Rencontre avec Justine Emard, Jean-Michel Geneste et Rachel Debs autour de cette question : et si on pouvait sculpter les rêves ?
Le travail de Justine Emard s’attache à créer des liens inédits entre les êtres et les technologies, via l’exploration du monde minéral, de la vie artificielle, des technologies de perception, de l’automatisation et de l’apprentissage des machines. Pour sa dernière création, Hyperphantasia, elle crée un espace de rencontre entre 36 000 ans de technologies des images, depuis les premières peintures rupestres jusqu’aux images issues de notre cerveau dans l’espace. À partir d’une base de données scientifiques de la grotte Chauvet Pont-d’Arc, une intelligence artificielle a fabriqué de nouvelles images de la préhistoire pour la création de l’œuvre. En parallèle, en 2021, une mission du Centre national d’études spatiales (CNES) et de l’Agence Spatiale Européenne (ESA) étudie l’évolution du sommeil dans l’espace. Des données encéphalographiques enregistrées sur plusieurs nuits permettent de transformer des signaux de rêves en sculptures. Sous forme d’installation vidéo et sculpturale, Hyperphantasia révèle ainsi la naissance de nouvelles images depuis les profondeurs de nos imaginaires. Cette œuvre est produite par le Fresnoy – Studio national des arts contemporains et réalisée dans le cadre de la résidence hors les murs de l’Observatoire de l’Espace, le laboratoire culturel du CNES.
Née en 1987, Justine Emard explore les nouvelles relations qui s’inventent entre nos existences et le champ des technologies. En associant différentes techniques de l’image – photographie, vidéo, réalité virtuelle ou encore performance – elle situe son travail dans un flux d’expérimentations mêlant la robotique, les neurosciences, la vie organique et l’intelligence artificielle.
Archéologue du paléolithique passé par la direction de Centre national de la préhistoire, Jean-Michel Geneste étudie, depuis plus de 20 ans, l’archéologie des grottes ornées, notamment en tant que directeur des recherches de la grotte de Lascaux. Attaché à la médiation de la préhistoire par le biais des nouvelles technologies, il est notamment à l’origine des programmes de numérisation 3D des grottes de Lascaux et de Chauvet.
Neurologue à l’unité du sommeil et des explorations neurophysiologiques du CHU de Toulouse, Rachel Debs se prête également au jeu de la production artistique. Lors de sa collaboration sur la pièce Hyperphantasia (2022) de Justine Emard, elle étudie le sommeil au cours des voyages spatiaux dans le cadre de l’expérience DREAMS avec l’Agence Spatiale Européenne (ESA).
Rencontre animée par Marion Zilio
Marion Zilio est enseignante, critique d’art et commissaire d’exposition indépendante. Docteure en Esthétique, Sciences et Technologies des Arts de l’Université de Paris 8 Vincennes-Saint-Denis, elle est l’autrice de Faceworld. Le visage au 21e siècle (PUF, 2018 ; Polity Press, 2020) et Le livre des larves. Comment nous sommes devenus nos proies (PUF, 2020 ; Cactus, 2022).
Portfolio
Véritable laboratoire de formes, Portfolio s’inscrit dans le programme de la Gaîté Lyrique consacré aux nouvelles écritures, ces formes de narration plurielles, hybrides, réinventées par les nouveaux médias et les technologies d'interaction et d’immersion. Ces rencontres sont l'occasion de faire dialoguer des artistes récemment sortis du Fresnoy ou en cours de cursus avec leurs enseignantes et enseignants, mais aussi avec des critiques et des scientifiques. Chacun et chacune à leur façon, ces jeunes artistes explorent notre époque et ses potentialités technologiques, et créent des ponts entre création artistique, recherche scientifique et enjeux de société pour (re)formuler un futur désirable.