Le mythe du progrès, porté par les innovations technologiques, ne fédère plus guère les imaginaires. Nous faisons pourtant paradoxalement l’expérience quotidienne de sa puissance. Comment s’orienter dans ce débat ? Et comment échapper à la fausse alternative entre le progrès et son contraire, dont on peine à entrevoir ce qu’il pourrait être ? L’hypothèse développée ici est que le concept de transition, avec sa portée prospective, permet de penser autrement le progrès en y voyant une double composante utile et subtile qui peut faire saisir les tensions et complémentarités entre progrès technocapitaliste et progrès humain. C’est dès lors toute la problématique de la propagande innovative qui est éclairée d’un jour nouveau : à l’innovation, sommation de s’adapter au nouveau, fait contrepoids la transition, volonté « d’aller au-delà » et de créer un avenir plus adapté à nos désirs. (PC)
Pascal Chabot est philosophe. Il enseigne à l’IHECS (Bruxelles) et a fait paraître « La philosophie de Gilbert Simondon » (Vrin, 2003), « Après le progrès » (PUF, 2008) et « Global Burn out » (PUF, 2013). Dans ses ouvrages, il s’interroge sur la façon dont la civilisation comprend aujourd’hui sa marche en avant. C’est notamment en s’appuyant sur Simondon qu’il introduit la nécessité de penser autrement le progrès, en réévaluant la propagation technique comme cadre structurant pour l’humanité et non comme invasion « sans culture ni conscience », et en appelant à abolir le progrès utile au profit du progrès subtil.