Au cours de l'histoire, par souci de coquetterie ou par symbolisme, les hommes et les femmes ont toujours infligé d'étranges tortures à leur silhouette. "Monsieur Tendances" le sociologue Pascal Monfort se penche sur la question.
La mode est monstrueuse.
On cède à tous ses caprices sans la moindre retenue même lorsqu’elle nous invite à, justement, nous transformer en jolis monstres. Depuis l’aube de l’humanité, les coquets maltraitent leur enveloppe naturelle pour qu’elle réponde aux canons de l’air du temps. En Chine, les femmes se bandent les pieds jusqu’à se mutiler. En Afrique, les scarifications recouvrent les corps des plus élégants. En France, après la Révolution, de jeunes excentriques contrefont leur silhouette en glissant des bosses sous les redingotes. En Angleterre, des femmes se rasent la nuque et se coiffent en crêtes. En Autriches, les crinolines dessinent des hanches si larges que les belles ne passent plus les portes des palais où elles se rendent pour danser.
La mode est monstrueuse et l’on se plie volontiers à ses désirs les plus exigeants. Elle nous dictent de nous maltraiter et nous nous exécutons sans nous rebeller. Elle encourage tout autant la douleur que le confort et préfère la passion à la raison. La mode ne s’embarrasse pas des choix de la nature car elle les modifie à sa guise, parfois sans donner la moindre explication. Elle nous murmure simplement qu’il est de notre devoir d’être séduisant pour notre entourage.
Pascal Monfort est consultant en prospective (Cabinet Pascal Monfort) et enseigne la Sociologie de la Mode et l'Histoire de la Mode dans les plus grandes écoles françaises.