Pour rendre le format MP3 plus léger, des fréquences inaudibles pour l’humain ont été supprimées. L’artiste Matthieu Saladin a conçu un encodeur MP3 inversé pour questionner ce qui ne peut être entendu. Juliette Volcler pose, elle, les enjeux politiques et sociaux du silence dans l’espace public.
Performance de Matthieu Saladin
Avec La capture de l'inaudible, Matthieu Saladin propose d'exposer ce que nous élaguons et plaçons en périphérie par souci d’efficacité et de simplification. Il invite à une réflexion esthétique, sociale et politique autour de l'inaudible. D’une part, l’inaudible est ici compris au sens de ce qui appartient au domaine des sons ne pouvant être entendus. D’autre part, l’inaudible renvoie à ce qui excède l’entendement d’un groupe, d’une communauté, voire d’une société, en tant qu’il est construit socialement, culturellement et historiquement : ce qui ne peut être entendu.
La capture de l'inaudible est une performance qui repose sur un encodeur MP3 inversé. Alors que l'encodage MP3 supprime les fréquences inaudibles pour réduire la taille d'un fichier audio, donc plus facile à stocker et à partager, cet encodeur conserve uniquement ces mêmes fréquences et les propose à l'écoute.
Matthieu Saladin : artiste et musicien, sa pratique réfléchit à travers un usage récurrent du son, sur la production des espaces, l’histoire des formes et des processus de création, ainsi que sur les rapports entre art et société du point de vue économique et politique. Maître de conférences en arts plastiques à l’université Paris 8, sa recherche théorique porte principalement sur les arts sonores et les musiques expérimentales. Il codirige la collection Ohcetecho aux presses du réel, participe aux comités de rédaction des revues Volume! et Revue et Corrigée, et est directeur de rédaction de la revue de recherche TACET.
Conférence de Juliette Volcler
Juliette Volcler intervient sur une autre dimension de l'inaudible en questionnant les politiques et usages du silence dans le contexte des espaces publics et de la vie sociale. Le silence se trouve régulièrement présenté, dans les milieux artistiques comme dans les plaquettes immobilières, comme une ressource rare, à préserver ou à reconquérir. Elle questionne cette quête apparemment évidente d'un âge d'or acoustique à retrouver.
Juliette Volcler : chercheuse indépendante, autrice et critique sonore, elle travaille sur les usages sociaux et politiques du son, ainsi que sur l'histoire de la création sonore. Elle a publié deux essais : Le son comme arme. Les usages policiers et militaires du son (La Découverte, 2011) et Contrôle. Comment s'inventa l'art de la manipulation sonore (La Découverte – La Rue musicale, 2017). Elle assure la coordination éditoriale de la revue de critique de la création sonore et radiophonique Syntone.
Cette rencontre fait partie du cycle Inaudible Matters, du 12 septembre au 12 décembre 2019 à la Gaîté Lyrique, programmé par Marie Lechner et Anne Zeitz. Elle est en lien avec l'exposition "Sound Unheard", du 12 septembre au 27 octobre 2019, au Goethe Institut.